jeudi 25 janvier 2007

TÉMOIGNAGE SUR LA UIE à PROXIMITÉ D'UN AÉROPORT

D’après B.G de Fay de Bretagne

"Je réponds volontiers à la demande de témoignage sur la vie quotidienne à proximité d'un grand aéroport."

"L'expérience que j'en ai est partielle mais me paraît suffisante."

"Ma famille est originaire de Saint-Quentin-Fallavier, à l'origine petite commune tranquille située à une vingtaine de kilomètres au nord-est de Lyon. "

"Les activités de la région étaient essen­tiellement à vocation agricole avec, aussi, la fourniture de main-d’œuvre pour les industries de la périphérie lyonnaise (notamment les usines Berliet, actuellement Renault poids lourds)."

"Malheureusement, située au carrefour des grandes voies de communication entre les pays du nord (Allemagne, pays nor­diques), la Suisse et les pays du sud (Italie, péninsule ibérique), la région était un endroit idéal pour implanter un grand aéro­port international, celui de Lyon-Bron ne suffisant plus et étant incorporé à la ville avec le développement de la banlieue. Ce qui fut fait, sur la commune de Satolas (Lyon Saint-Exupéry, depuis peu)."

"Saint-Quentin-Fallavier se trouve à 10-12 kilo-mètres des pistes de l'aéroport et la maison de ma sœur, malheureusement à peu de choses près, sur l'axe des pistes.
Quand je séjourne dans ma famille, je constate que l'inconvénient majeur reste bien sûr le bruit, très gênant, surtout lorsqu'un avion atterrit toutes les 3 minutes, ce qui est fré­quent surtout dans la soirée (les atterrissages de nuit étant réduits voire interdits, ce qui n'est pas toujours respecté). Le bruit est net­tement majoré lorsque les avions décollent (suivant la direction des vents). "


"Le soir, la personne qui rentre du travail et qui veut se détendre pourra, par exemple, difficilement écouter de la musique, même avec des fenêtres à double (triple) vitrage fermées en raison du bruit et des vibrations. "

"Le niveau sonore des conversations est obligé d'être élevé. Chaque fois que je rencontre ma sœur et mes neveux, je trouve qu'ils parlent en criant..."


"Par ailleurs, même s'il existe des normes au niveau sonore (déjà insuffisantes), il faut savoir que les avions ne respec­tent pas très précisément les couloirs, ni l'altitude au-dessus des habitations, etc. "

"Comment pour les riverains contrôler ces dysfonctionnements ?"

"Quelquefois, des taches brunâtres viennent souiller le linge étendu dehors, d'autres fois on retrouve des traces d'hydro­carbures à la surface des réserves d'eau d'arrosage.
Les avions se délestent parfois du carburant. II y a des zones pour le faire, mais sont-elles vraiment respectées ou alors les résidus sont-ils transportés par les vents ? "

"Les autres grands types d'ennuis sont liés au développement des infrastructures qui accompagnent l'aéroport (voies de chemin de fer — TGV lui aussi très bruyant — routes à 4 voies) et à l'urbanisation (habitations, supermarchés, panneaux publicitaires, centre de détention, etc.). De plus, il y a toujours quelque chose en chantier, l'aspect de la région change continuellement. "


"En quelques années, la région a changé de mode de vie, toute la culture sociale a été bouleversée par une urbanisation galo­pante. Elle est devenue une sorte de banlieue sans âme."

"Saint-Quentin-Fallavier, le petit village tranquille avec implanta­tion de résidences secondaires pour les citadins lyonnais, a perdu son histoire. II est devenu une sorte de ville-dortoir avec une rotation des habitants. Bien évidemment, tous les problèmes rencontrés ailleurs dans les banlieues se sont développés. "

"En ce qui concerne l'emploi, il faut bien se rendre compte que l'installation d'un aéroport n'amène pas d'industries de produc­tion mais plutôt des affaires liées au stockage et des emplois dans les services qui accompagnent l'urbanisation.

Sur la zone d'activités de la commune se sont construits, au bord de larges avenues, de grands hangars de stockage de marchandises pour approvisionner des magasins, des industries proches ou plus éloignées, voire situées à l'étranger. II y a aussi des entreprises de transport (possibilité de dédouaner dans la zone aéropor­tuaire). Le nombre de camions qui circulent dans les parages est impressionnant. Les répercussions du trafic sont importantes (bruits, pollution...). Cette zone d'acti­vités, très importante en superficie, ne fournit paradoxalement que peu d'emplois liés au magasinage, à la restauration rapide et à l'hô­tellerie de passage (Formule 1, etc.). "

"D'immenses hangars gérés par informatique offrent des perspectives d'emploi, à savoir trois postes de magasiniers ! Les chauffeurs routiers ne sont pas forcément de la région (beaucoup sont même étrangers pour des questions salariales). La plupart de ces emplois sont des emplois à faible qualification, assez mal rémunérés et proposés comme des emplois précaires avec une mobilité importante. "

"Mon neveu dit : «s'il y a du boulot, c'est surtout du boulot assez mal payé dans lequel tu ne restes pas longtemps »... Le temps légal pour obtenir les avantages sociaux et éviter le paiement d'un maximum de charges.
Le soir, la zone d'activités se désertifie (activité réduite aussi chez les transporteurs) et devient lugubre. Ne restent que les gardiens et leurs chiens qui patrouillent dans les enclos autour des grands hangars."


"En résumé, grosses infrastructures, activités polluantes, minimum d'emplois, précaires qui plus est, pour réceptionner le produit du travail de personnes encore plus exploitées dans les pays du quart-monde : c'est ça le progrès !? "

"En conclusion, mon pays d'origine a changé, je ne le reconnais pas. Je n'y terminerai certainement pas ma vie, comme je l'aurais souhaité, ainsi que d'autres personnes ayant dû quitter leur région d'origine pour raisons professionnelles.

Je ne souhaite pas que ces changements se reproduisent dans la région où je me suis installé.
Je ne vous le souhaite pas non plus. "


Une vidéo d'un atterrissage à St Martin :

St Martin
envoyé par podzob

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